Patrimoine et gouvernance urbaine : Au Ngondo 2025, Douala façonne sa mémoire par la culture
Le 7 décembre 2025, sur les berges du fleuve Wouri à Douala, le Ngondo a refermé son édition dans une ferveur populaire et spirituelle rare. Bien plus qu’une célébration identitaire, l’événement a mis en lumière la capacité de la capitale économique camerounaise à transformer son patrimoine culturel en levier de cohésion sociale, de transmission intergénérationnelle et de gouvernance urbaine.

Ce dimanche-là, Douala a renoué avec son essence profonde à l’occasion de la clôture du Ngondo, grande célébration du peuple Sawa inscrite au patrimoine immatériel du Cameroun. Le temps d’une journée, les rives du Wouri se sont ainsi transformées en un espace de mémoire partagée, de rassemblement et de dialogue social. Placée sous le thème « Ja Jongwanele o Kotome », véritable appel à la solidarité dans le rassemblement, l’édition 2025 a conjugué retour aux sources et affirmation contemporaine d’une identité urbaine pleinement assumée.
Moment central et hautement symbolique, le Culte des Oracles de l’Eau a rappelé la relation fondatrice entre les Sawa et le fleuve Wouri. En plongeant pour consulter les Miengu, les initiés ont délivré un message de vigilance, d’unité et de fidélité aux valeurs ancestrales. Au-delà du rite, c’est une lecture collective du présent qui s’est imposée, inscrivant la spiritualité dans les réalités contemporaines. Ici, l’eau n’est jamais décorative : elle demeure mémoire vivante, repère identitaire et lien invisible entre les générations.

Autour de ce temps fort, la ville a vibré au rythme des courses de pirogues, des danses traditionnelles, des chants, des luttes et des prestations culturelles. La remise de distinctions par le couple royal Douala Bell, entouré d’autorités traditionnelles et administratives, a honoré lutteurs, groupes culturels, Miss cantonale et membres de la garde royale. Un geste symbolique mais fort, traduisant une reconnaissance publique de celles et ceux qui font vivre la culture comme moteur de vitalité urbaine.
Par ailleurs, la présence du ministre des Sports, Narcisse Mouelle Kombi, a donné à l’événement une portée nationale. En appelant à la préservation des traditions, il a rappelé que le Ngondo dépasse largement le cadre festif. Il s’affirme comme un acte de résistance face à l’uniformisation culturelle. Pour Douala, c’est aussi une démonstration de gouvernance culturelle, où tradition et modernité dialoguent sans s’opposer, et où la culture devient un outil stratégique de structuration de l’espace urbain.

À l’heure où les villes africaines cherchent à affirmer leur singularité, Douala montre ainsi une voie possible : faire de la culture un socle, et non un supplément. Le Ngondo 2025 s’achève dans la fierté et l’espérance, avec la promesse d’un rendez-vous renouvelé. Sur les rives du Wouri, la ville continue d’écrire son avenir en restant fidèle à sa mémoire.
Yolande T








