Renaissance industrialo-économique : la SONARA rallume le moteur du progrès à Limbé
Il n’y a pas eu de tambours, ni de longues cérémonies. Juste un mardi calme, le 17 juin 2025, où les murs encore cicatrisés d’une raffinerie à moitié reconstruite ont accueilli les pas discrets mais déterminés de trois géants bancaires : UBAF, ING, MCB. Trois sigles, trois regards, posés sur ce que beaucoup dans le pays considèrent comme un miracle industriel. La SONARA, longtemps plongée dans les cendres de l’incendie de mai 2019, renaît. Non pas dans l’exubérance des communiqués, mais dans l’évidence des faits. Et si cette renaissance silencieuse portait déjà les germes d’un nouvel avenir pour Limbe et au-delà ?
Ils sont venus voir, observer, interroger. Et sont repartis, marqués. Ce qu’ils ont vu ne se mesure pas seulement en béton coulé ou en kilomètres de tuyauterie remplacés. Le 17 juin, alors que le jour se levait sur la baie de Limbe, la Société Nationale de Raffinage du Cameroun a ouvert ses portes, non pas pour faire bonne figure, mais pour démontrer. Derrière les visages concentrés, derrière chaque mot pesé, une conviction partagée : l’Afrique industrielle peut, et doit, s’élever par ses propres forces.
« Nous sommes ici pour voir concrètement l’état d’avancement de la transformation en cours. Aujourd’hui, le marché camerounais suscite un réel intérêt, et la SONARA en est clairement l’un des pôles les plus prometteurs », a déclaré Antoine Blainreaux, l’un des banquiers présents. Une prise de parole qui en dit long. Car cette visite ne relève pas du simple rituel institutionnel. Elle marque une bascule stratégique matérialisée par une SONARA qui ne suscite plus l’intérêt par effet d’annonce, mais par la cohérence de son action, la clarté de sa trajectoire et la rigueur méthodique de sa reconstruction. Un signal fort qui réinstalle l’entreprise au cœur des radars financiers internationaux.
Depuis cinq ans, l’entreprise a entamé une refondation méthodique : modernisation des équipements, élévation des standards environnementaux, refonte de la gouvernance. À chaque étape, une seule boussole : remettre l’outil industriel au service du pays, dans une logique de durabilité et de souveraineté. « La reconstruction de la SONARA est une priorité du Directeur Général, et se retrouver dans cette réunion démontre que nous sommes avancés dans le processus », affirme Jean Marc Yamb, conseiller technique de l’entreprise. Un propos qui fait écho à ce que les partenaires internationaux ont pu constater sur le terrain.
La montée en puissance est tangible : relance progressive de l’activité, investissements massifs dans la sécurité industrielle, reconfiguration des circuits d’approvisionnement pour mieux intégrer les dynamiques régionales. Mais derrière les chiffres, c’est une histoire humaine qui s’écrit. Celle d’une ville blessée qui retrouve sa respiration. Celle d’ouvriers rappelés, de sous-traitants mobilisés, de jeunes formés. La SONARA n’est plus une entité industrielle isolée : elle devient, peu à peu, le cœur d’un écosystème urbain en reconstruction.
À Limbe, la raffinerie n’est pas seulement une infrastructure. Elle est une promesse. Une promesse de stabilité, de dignité retrouvée, de projection vers l’avenir. « Il y a ici une discipline, une vision, une envie de faire mieux. Nous ne venons pas juste investir, nous venons accompagner une ambition durable », confiait un représentant d’ING en quittant le site, sous couvert d’anonymat. Un témoignage qui en dit long sur la confiance restaurée.
Car il fallait plus que des financements. Il fallait rétablir un récit. Montrer que les années de silence n’étaient pas synonymes de renoncement, mais de travail souterrain, de rigueur retrouvée. Dans un pays où de nombreux projets échouent à franchir le seuil de l’intention, la SONARA s’impose comme un contre-modèle. Une raffinerie d’État qui redémarre, portée par une gouvernance rénovée, et qui attire à nouveau les bailleurs ? C’est rare. Et cela mérite d’être dit.
Ce que la SONARA propose désormais, c’est une version 2.0 d’elle-même. Une raffinerie plus sobre, plus résiliente, plus alignée sur les attentes du XXIe siècle. Une entreprise qui ne se contente plus de raffiner le brut, mais qui veut contribuer à raffiner l’avenir, celui d’une ville, d’une jeunesse, d’un pays. Dans cette trajectoire exigeante mais lucide, Limbe devient le témoin d’une Afrique qui apprend à se réinventer sans s’excuser d’exister.
Demain, peut-être, d’autres villes suivront. Non pas pour copier un modèle, mais pour s’en inspirer : celui d’un territoire qui a su transformer une épreuve en levier. Celui d’une entreprise qui a troqué le bruit des slogans pour la parole sobre des résultats. Et si, au fond, c’était cela, le vrai visage du progrès ? Un visage grave, déterminé, et tourné vers l’avenir.
Danielle Hélène Ngondjo